LES INROCKS INTERVIEW DE DOMINIQUE A

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artefactis
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LES INROCKS INTERVIEW DE DOMINIQUE A

Message par artefactis »

Dominique A revient pour nous sur la Victoire de la Musique qu’il a empochée ce week-end. “J’ai appris, l’âge aidant, à apprécier les médailles”, explique-t-il.
Comment te sens-tu ?
Je suis un peu redescendu. (rires) Je me sens plutôt bien, pour l’instant il n’y a pas de bouleversement trop radical dans ma vie. Mais ça change la donne, je dois me préparer : ça vient au bout d’un an d’activité, je commençais une phase un peu descendante de fin de tournée, le moment où les choses se tassent. Mais la balance repart de l’autre côté, ça peut être un peu troublant, il faut ajuster les choses.

Avant cette Victoire de la Musique, les prix, en général, t’inspiraient quoi ?
J’ai appris, l’âge aidant, à apprécier les médailles… Pas à les rechercher, mais cette Victoire a une saveur particulière, ce n’est pas anodin. Ce qui m’importait avant tout était d’être nominé, et de jouer, mais le temps passant, tu finis par oublier cet essentiel et tu te mets à rêver d’une Victoire. J’étais en compagnie de gens comme Lou Doillon, Barbara Carlotti, Rover, La Grande Sophie : je ne me sentais pas, comme dans le passé, décalé par rapport aux nominations, j’étais content d’être si bien entouré. Après, c’est humain, il y a une part de vanité, tu as envie de…

Tu aurais tenu le même discours il y a dix ans ?
Non. Il y a dix ans, ça me passait un peu au-dessus de la tête, je regardais les Victoires comme la cérémonie d’un monde dont je ne faisais pas partie. Il y a eu un tournant dans les années 2000, avec l’émergence de beaucoup d’artistes français intéressant. Evidemment, même aujourd’hui, ça reste une soirée de gala, mais ce n’est pas les NRJ Awards. C’est marrant, je vois dans les commentaires pas mal de gens qui s’insurgent en parlant de choix branchés ou bobos, d’une représentation de l’intelligentsia parisienne : un certain nombre de personnes sent que les rênes sont en train de leur échapper, ils parlent de la manifestation comme si n’étaient invités que des gens qui n’intéressent personne, qui n’ont pas de public, qui ne tournent pas. J’encourage ceux qui disent ça à venir en province, à venir voir les salles pleines, à voir que tout ceci est une réalité, qui malheureusement est souvent masquée par le phénomène des télé-crochets. La grosse variété s’accroche…

C’est un juste retour des choses…
On a bouffé de la merde pendant des années, sans rien dire. Mais les gens qui nous ont fait bouffer de la merde commencent à se plaindre de ne plus réussir à nous en faire bouffer autant. C’est un équilibre, une balance entre ce qui se passe dans le pays, entre la vraie vitalité qui existe dans la scène française, et qui n’était pas reflétée il y a quelques années, et le reste. Pourquoi est-ce que ça marche dans les pays anglo-saxons ? Parce qu’il y a un renouvellement. Il s’est fait ici aussi, il faut en parler. Ou alors on se contente de faire un listing des plus grosses ventes de disques, et on n’en parle plus. Ce n’est pas une histoire de branchouille. J’ai une formule : “plutôt la branchouille que la franchouille”. Parce que la franchouille, on en a trop bouffé pendant des années.

Et cette émergence de la scène française, historiquement, tu n’y es pas pour rien…
J’y participe, j’y participe… (rires) Mais je vais finir par y croire, et la Victoire entérine ça. Mais je trouve qu’on, et je dis “on” parce que nous sommes plusieurs, des gens comme Biolay par exemple- qu’on représente aussi d’une certaine manière tout ce qui se passe en souterrain, tout ce qui est moins visible. Lou Doillon, Rover, Barbara Carlotti, Oxmo Puccino, Biolay : on ne parle pas au nom des autres, mais on n’est que la partie émergée de l’iceberg, que la devanture de la vitrine, et il y a plein de trucs très intéressants dans le magasin. Daho a pu jouer ce rôle, et je trouve aberrant que quelque comme Miossec n’ai jamais été récompensé. Reste que je trouve la cérémonie beaucoup moins mortifère qu’elle ne l’a été.

Et la soirée elle-même, que peux-tu m’en dire ?
Dans les loges, il y a pas mal de gens qui ne devraient pas être là, pas mal de parasites, je ne connaissais pas grand monde… (rires) Mais l’ambiance est plutôt bon enfant, la valse des micros et les crépitements de appareils photos dès qu’un gagnant apparaît font un spectacle assez marrant, ça doit un peu ressembler au Festival de Cannes. Rien de particulier, mis à part l’attente, assez longue, assez usante. Il ne se passe rien pendant des heures, puis soudainement c’est le branle-bas de combat, tout le monde s’excite, tu as l’impression qu’un incendie vient de se déclarer… Une excitation très brutale.

Quelles ont été tes toutes premières pensées, quand tu es monté sur scène ?
Je conseille à tout le monde de vivre quelque chose comme ça. C’est comme prendre des acides sans prendre des acides… (rires) J’ai vécu ça plusieurs fois, des moments de joie pure : l’artiste est un être faible, il a besoin de moments où il sent l’amour des gens converger vers lui. On ne le sent pas toujours quand on est en tournée, car il y a un côté répétitif, on oublie un peu tout ce que les gens peuvent vous renvoyer. Là ça a été très très fort, d’autant que rien n’avait filtré et que la surprise a été totale. Un moment où la réalité me semblait très tordue, ça ne me semblait pas dans l’ordre naturel des choses. Après, j’ai dit quelques conneries devant certains micros, comme par exemple que pendant 20 ans j’avais été considéré comme un loser. Je suis fort en autodénigrement, c’est pour moi un sport de combat, et j’ai avec cette phrase été à mon summum ; je regrette cette phrase, débile, si je pouvais l’effacer, ce serait parfait.

Tu disais que ça allait relancer les choses pour toi ?
On va sans doute vendre un peu de disques, faire des dates supplémentaires, trouver des salles sans aucun problème. Ca relance l’intérêt, c’est du piquant, c’est un aiguillon pour les gens. Une dynamique se remet en route, et ne va pas faiblir. Il y a quelque chose d’étonnant : plus je suis connu, plus je vends de disques, plus je tourne, plus j’entends dire que je suis un “outsider”. Le fait d’avoir reçu une Victoire va peut-être un peu changer ça, remettre les choses à leur place : je ne suis certes pas un gros vendeur de disque, mais l’album est disque d’or, je ne suis plus un inconnu, je tourne en France, en Espagne, devant des salles de 500 ou 600 places en moyenne, parfois plus, il faut arrêter avec cette boulimie du chiffre qui n’a pas de sens, et dont je n’ai pas besoin pour exister.

Tu n’as jamais eu peur de devoir attendre d’avoir l’âge d’Enrico Macias pour recevoir une Victoire honorifique ?
(rires) Il y a trois ans, j’ai reçu un prix de l’Académie Charles Cros pour l’ensemble de ma carrière. C’était à la fois très gratifiant, mais aussi tétanisant, comme si ma carrière était derrière moi. Et Hugues Aufray recevait le même prix en même temps…Mais à tout âge, quand on est artiste, on a peur du vide et de la désaffection des gens : chaque signe de reconnaissance est important et il ne faut pas cracher dessus. C’est aussi important pour tous les gens qui travaillent avec vous : le soir des Victoires, ils étaient récompensés de tous leurs efforts, de toute l’énergie qu’ils ont dépensée, et c’est une vraie joie pour eux.


par Thomas Burgel
le 12 février 2013 à 13h08
Blabla
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Re: LES INROCKS INTERVIEW DE DOMINIQUE A

Message par Blabla »

Après, j’ai dit quelques conneries devant certains micros, comme par exemple que pendant 20 ans j’avais été considéré comme un loser. Je suis fort en autodénigrement, c’est pour moi un sport de combat, et j’ai avec cette phrase été à mon summum ; je regrette cette phrase, débile, si je pouvais l’effacer, ce serait parfait.
Ouf !Merci !
Dominique, si tu pouvais aussi revenir sur :
je suis aimé par peu de gens pour le moment, mais ils me donnent beaucoup d’amour»
Ca sonne trop "franchouille"...

Et là, promis, je retire aussi !
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Jröm
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Re: LES INROCKS INTERVIEW DE DOMINIQUE A

Message par Jröm »

Pour les amateurs de ce magazine télé, vous pouvez aussi lire cette article :
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en rapport avec les "Victoires de la Musique".
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