L’horizon en hébreu

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youly
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L’horizon en hébreu

Message par youly »

J’ai traîné la patte avec ça, mais comme promis j’ai enfin traduit de l’hébreu une chronique sur L’horizon trouvée sur un site israélien. (http://www.hasharat.co.il/html/article_17028.php pour la référence)
Je l’ai traduite presque en entière- sauf la deuxième partie qui contient une brève bio de Dom et quelques références ici et là pas vraiment essentielles et qui seront incompréhensibles aux non- israéliens. J’ai un peu hésité avant de poster cette traduction, elle assez est honteuse… Un tel concentré de mauvais français, des phrases à rallonges et autres maladresses syntaxiques- vous avez rarement lu, mais j’espère que vous ne me tiendriez pas rigueur. À ma défense, je peux dire ceci: avez-vous déjà essaye de raisonner 2 gamins en train de se battre ?? Voilà à quoi ressemble la transition entre l’hébreu et le français, et en plus le français ce n’est pas ma langue…
Alors voilà, j’espère que cette lecture vous fera plaisir quand même, je suis curieuse de lire vos réactions…



DOMINIQUE A –L’HORIZON
Une chronique de Yaïr Yona


Première partie- je devais comprendre l’incompréhensible (et en plus je ne l’ai jamais rencontré dans la vraie vie)

Si je devais associer une couleur avec Dominique A. ce serait un bleu foncé, même s’il monte toujours sur scène habillé en noir, d’un noir élégant et sophistiqué. Il est de ces personnes qui lisent le journal avec les lunettes au bout du nez, et te parlent en te regardant au-dessus des lunettes. Il est chauve, grand, impressionnant, beau, avec une guitare Telecaster. Oui, on peut voir qu’il est le nouveau Crash.
Son bleu foncé retient en lui des vielles scènes de nouveaux films, et un travail de guitare d’un seul homme qui sonne comme une orchestre. On pourrait croire que godspeed you! black emperor joue dans son disque (comme dans la chanson l’horizon). Non, il ne joue pas de post-rock, mais ce genre de crescendo- là, on peut le trouver seulement dans les salles de concert européens, de cette Europe dure, froide, mordante, peinte elle aussi d’un bleu foncé- foncé, de ce bleu de la nuit qui tombe.

Troisième partie- une ouverture au disque et une ouverture au monde.

Seulement un piano et une guitare sont au commencement de ce chef-d’œuvre qui s’appelle L’horizon, la chanson et l’album. Dominique avait exprimé le désir d’un son plus simple que celui de ses disques précédents, et c’est en effet de cette manière-là que commence cette chanson, et puis petit a petit ça devient de plus en plus tendu. Cette tension montante est due au rythme ¾ de la chanson, l’interprétation de Dominique, et puis à la fin, à cet orchestre de guitares électriques qu’il construit couche après couche en reprenant la mélodie de la chanson. Godspeed, je l’ai déjà dit.
Après 7 minute d’écoute, on réalise qu’on n’a pas compris un mot parce que ce n’est pas sa langue, mais même si on parle français, on ne comprend rien.
C’est un autre français, le genre qui navigue entre les cinéastes et auteurs français appréciés du moment et aussi de l’époque précèdent. Chaque phrase contient en elle tout un univers.
C’est ainsi que Dominique sort de la catégorie singer/songwriter et entre dans celle qu’on peut appeler « artistes que tu aimes et dont du n’a aucune idée de quoi ils parlent ».
Pour préparer cette chronique, j’ai utilisé le système de traduction automatique de google pour traduire toutes les chansons vers l’anglais. Et encore, je n’ai rien compris. Non seulement parce que ce système étant automatique rate les jeux de mots, les ambiguïtés de la langue etc., mais aussi parce que le français moyen ne comprendra pas. Dominique A. est chauve, grand, habillé en noir et regard le monde à travers des lunettes de lecture. Il est mystérieux.
Cette chanson d’ouverture, 7 minutes que chez n’importe quel autre artiste auraient fait fuir l’auditeur, est tellement possessive- un trou noir exigeant dans lequel on se noie- qu’elle attire et rassemble les auditeurs. Elle est tellement puissante que ceux qui l’écoutent sont immédiatement atteints d’une sorte de mini- choque et d’une paralyse générale. Ses couplets chatouillent l’oreille, tantôt en caressant, tantôt en envoyant des coups de pieds, et la finale, ce concerto de guitares te met à plat.
Bienvenu dans un monde meilleur, si c’est comme ça que tu veux le voir.

Quatrième partie- ok, très bien, une ouverture, et le reste?


Le reste ? Je ne sais pas comment le dire. Disons simplement que cela fait au moins un an qu’aucun disque ne m’a saisi comme l’a fait L’horizon. Il est d’une qualité à laquelle nous ne sommes pas habitués. Il est vrai que les mystères du français rendent souvent les chansons merveilleuses mais il y a ici quelque chose de plus; quelque chose dans les mélodies simples et la production non- pompeuse mais extrêmement précise qui captive l’oreille et rend accro.
Et même ceux qui n’ont plus de tendances dépressives depuis l’adolescence se trouveront aspirés dans cette pure mélancolie qui entraîne dans les petites ruelles sombres, avec un zeste de la vie simple de bas-fonds et un de celle de ses nouveaux riches solitaires qui traînent dans les soirées mondaines et puis retournent seuls à la maison sans même un chien pour se chauffer les pieds. (Pour l’histoire complète, il faut écouter where do you go to my lovely de Peter Sarstedt).
Mais il ne faut pas croire qu’il s’agit ici d’un disque d’un looser nombriliste, ce n’est pas le cas.
Il y a aussi des chansons rythmées de batterie, qu’on pourrait croire joyeux, comme dans un camion, retour au quartier lointain ou encore la pleureuse.
Mais ce Dominique, cet incroyable musicien plein d’inspiration, est un mauvais menteur. Même dans ses chansons les plus joyeux, il y a quelque chose de triste qui bouillonne sous la surface, et qui monte dans la tête après l’écoute de la chanson et te fait poser la question- pourquoi je me sens déséquilibré après avoir écouté une chanson joyeuse ? Probablement parce qu’il n’a jamais essayé de te rendre joyeux. S’il veut se désespérer, il va se désespérer. Et si ça ne te convient pas, t’à que passer ton chemin.
Et donc tu continues et tu arrives à la fin du disque, à l’avant dernière chanson. Le temps s’arrête, les instruments se taisent, les muses s’explosent, et le cœur se déchire (et si j’enlève la métaphore de la dernière phrase pour appliquer que des mots simples et sincères, pour dire les choses d’une manière non poétiques- je dirais encore, le cœur se déchire, vraiment).

Cinquième partie- Rue des marais

Avec une guitare acoustique, un peu de cordes qui n’accaparent pas tout l’espace, on pourrait croire que Dominique est assis sur la l’enseigne de haut parleurs et nous lit l’histoire. Sa voix est tantôt très dramatique, tantôt déchirée et murmurante.
Il est le chansonnier moderne, avec tout ce jeu qui n’est pas de tout un jeu, et qui prend l’hystérie poétique de Jacques Brel et la confronte au goût du jour. Connaissez-vous la magnifique photo de Brel quand il chante Le port d’Amsterdam et Ne me quittes pas ? Quand le camera est pointé sur son visage et l’on peut voir les rides qui vont encore sortir, et que la sincérité et l’histoire traversent les années, l’objectif de l’appareil, le distance de continents et nous frappent dans la chair comme avec de l’acier brûlant- voilà ce qu’on ressent en écoutant cette chanson.
Je dois écouter encore 3 ou 4 disques de Dominique A. avant que je ne puisse déclarer avec assurance qu’il est le chansonnier le plus important depuis Brel (même si ma connaissance des chansonniers français est limitée…).

Sixième partie- quelque chose de moi.

Je n’ai pas écouté beaucoup de choses nouvelles cette année. Ici et la j’ai trouvé un peu de choses intéressantes (le nouveau akron/family), des choses qui ont fait sautiller le cœur avec excitation Bert Jansch avec un nouvel album excellent), j’ai couronné à moi tout seul le meilleur groupe du moment (My morning Jacket- un groupe incroyable), et puis quelques disques sympathiques qui passaient à côté les oreilles et parfois sautaient sur un vieux matelas dans l’âme (le dernière Ron Sexmith par exemple).
Mais le seul disque qui m’a remué, qui m’a emmené vers un endroit nouveau, qui m’a fait dresser les oreilles et demander WTF* ?? était L’horizon de Dominique A.
C’est un ami proche qui le suit depuis 3 ans qui me l’a fait découvrir. ( Et l’on peut constater les influences positives que la musique de Dominique a eu sur la sienne au-http://www.myspace.com/elirozen)
Il lui a fallu beaucoup de temps et d’insistance pour que je donne ça une chance. La barrière de la langue est une affaire importante pour moi, parce que les auteurs des chansons veulent que l’auditeur comprenne ce qu’ils expriment. Quand il s’agit d’une langue étrangère et que le texte est très important, c’est ennuyeux de ne rien comprendre. Mais là, j’ai écouté le dernier disque de Dominique A. et d’un état de choque de sa qualité musicale et sans savoir comment en écrire un seul mot, tous ses mots sont venus tout seuls. Apparemment, même la barrière de langue n’en est pas vraiment une, quand la sincérité crée un pont entre les langues.
Au début j’ai essayé encore de suivre la mauvaise traduction obtenue sur google, mais après j’y ai complètement renoncé. Il n’y a pas besoin de comprendre, c’est un plus, mais ce qu’il faut recevoir de la chanson, on le reçoit autrement; par l’interprétation, le jeu, la respiration, les murmures, les déchirures. Tout est là- une nouvelle scène d’un vieux film. Un acteur dans une allé, dans un camion, chauve, beau, habillé en noir, une musique bleue, les lunettes au but du nez, il lit Charles Baudelaire dans une rue à Bruxelles. À travers l’objectif de l’appareil, à travers la langue, il ne te considère pas, il danse dans ton âme.
Putain, il t’achève.

*WTF- what the fuck?
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