Retour sur l'excellent concert à Allonnes d'hier soir :
http://musique.fluctuat.net/blog/51674- ... ueurs.html
Le type émet quelques réserves sur le concert et se la joue mais c'est intéressant.
Je copie le texte ci-dessous pour ceux qui ne veulent pas aller y voir :
Après Fouesnant et avant Paris en fin de semaine, Dominique A présentait hier à Allonnes, près du Mans, dans la désormais célèbre salle Jean Carmet, un spectacle en deux parties. A l’entame, le chanteur au cou de taureau andalou revisitait prestement (l’album n’est pas long) son premier album, La Fossette, qui souffle en 2012 ses 20 bougies.
Personne n’en a fait un plat mais à l’échelle de la chanson française, cette nouvelle version de La Fossette, petit chef-d’œuvre minimaliste et en chambre en beat box et chant de pinson, vaut bien le scandale d’un Dylan passant à l’électricité. Pensez-vous. Tout le monde applaudit comme si c’était naturel, signe que l’esprit critique se perd. "Rendez nous la boîte à rythme, la chambre d’ado et les posters qui vont avec." Ce n’est plus du tout comme si c’était hier.
La Fossette revisited
En configuration trio (guitares et basse), Dominique A a, en effet, décidé de jouer son premier album gros bras et long manche. La tentation new wave du disque est mise en avant et les structures des chansons réhaussées selon les codes de l’époque : guitares qui grésillent un peu, tension dans la raquette, la voix qui s’est durcie, affirmée, fortifiée avec le temps. La Fossette, même débarrassée ainsi de ses bouts de ficelle et de sa fragilité de porcelaine, a belle allure. La dimension historique de l’album repose sur ce seul élément : tout y est. Les titres les plus incongrus ("Mes lapins", "Les habitudes se perdent", "La folie des hommes" et sa morale pour bébé phoque soulignée par le chanteur) résistent par la force de leur texte. Les autres chantés à la perfection par un Dominique A qui a fait ces 10 dernières années des progrès d’interprète considérables font merveille : "L’écho" en final impeccable, "Passé l’hiver" bien sûr et évidemment le toujours très attendu (et très entendu) "Le courage des oiseaux" lancé d’un "La chanson sans laquelle je ne serai pas là" interrogatif, dans une version qu’on ne connaissait pas. Sur "L’écho" justement, l’équilibre est un instant retrouvé entre la version moderne et électrique et le côté bricolo du passé. On aurait aimé que le Nantais soit plus aventureux sur ce coup-là et s’approche d’un peu plus près de son moi de 1992.
Le Grand Frère
Après un entracte de théâtre, Dominique A revient en terrain conquis (des familles et des vieux inrockuptibles avec des étoiles dans les yeux) pour présenter un second concert consacré quasi intégralement à son nouvel album baptisé Vers des lueurs (en mars). Difficile d’imaginer un set avec plus de 15 chansons jamais entendues par personne et recevant un tel accueil. Est-ce que cela tient à la qualité immédiate des morceaux ou à cette idée que Dominique A fait du Dominique A, ce qui s’avère exactement ce que les gens sont venus chercher ?
Les nouveaux titres sont pour certains remarquables ("Des leurs" sur un type qui rêve d’être dealer, "Ostinato" en force ou l’incroyable "Le convoi" de la fin), pour d’autres assez convenus ("Parce que tu étais là" raté, "La possession" ou "Rendez-nous la lumière" décevants) mais la signature du Nantais emporte tout sur son passage. Son chant en vers à 6 pieds peut agacer sur la durée mais donne une unité et une cohérence à l’ensemble qu’aucun autre chanteur français ne peut revendiquer. Le quintet à vent qui accompagne Dominique A fait souvent tapisserie et dessert parfois la musique en l’emmenant dans des territoires trop "chanson française" pour nous. "Loin du soleil" ressemble à un de ces morceaux du bord de la Méditerranée qu’on n’aime pas trop. A côté de ça, Dominique A balade son univers avec une classe innée et une force inouïe sur d’autres territoires. Avec "Close West", il se paie un rock à l’américaine percutant. Sur "Mainstream", un joli presque tube instantané des années 80, il s'amuse sur les rapports entre les musiques souterraines et la norme. Le morceau est presque trop intelligent pour ce qu'il dit. Les lumières sont subtiles, et au cœur du nouveau projet, descendent sur le crâne chauve du chanteur dont elles durcissent ou adoucissent le visage en fonction des morceaux. Dominique A se tient tendu comme une corde entre les mondes : un pied dans le rock, un pied dans la chanson. Il quitte rarement sa guitare. Quand il le fait, on découvre un autre bonhomme, les mains qui claquent comme des lassos morrisséens, quelques pas de danse, graciles pour un homme de cette taille et solide comme un roc. Il ne s’agit plus d’un grand écart mais d’un pont qui surplombe une rivière à demi asséchée. Plus grand monde ne joue, ni n’écoute cette musique aujourd’hui. Les gens d’ici le font encore, par nostalgie de leur propre adolescence.
Dominique et les fantômes
Il y a des fantômes dans la salle que Dominique A écrase du pied. C'est la durée qui crée l'intensité, le temps qui a filé et ce qui reste à accomplir. Pas étonnant que l'homme ait fait rééditer l'ensemble des albums. Les chansons de Dominique A forment un courant continu qui leur confère une à une un pouvoir qui les dépasse. Pour la plupart des spectateurs, 1992, c’était hier. Ils n’en croient pas leurs yeux. Dominique A a grandi avec eux. Ils ont rapetissé avec lui.
Le nouvel album n’est pas aussi contemplatif ou solaire que les prédécesseurs du sublime La Musique. C’est un album qui marie des observations précises du réel et des envies de quitter la ville. Les textes sont solides quand ils ne sont pas fumeux. Dominique A a réussi à faire de son imprécision une arme qui fait mouche à tous les coups. Le concert est magnifique, le groupe répond au doigt et à l’œil. Le bassiste en fait des tonnes quand le ton se durcit. Les presque 10 minutes du convoi viennent conclure un set épique avec une histoire magnifique. L’allégorie d’une salle survivante qui a passé les 20 ans à en prendre plein la gueule dans la vraie vie est à peine voilée. Formez le cercle. Une lumière rouge baigne tout le monde de chaleur filtrée sur l’immense "Par les lueurs" qui referme la boîte à rêves. Communion du communiant.
Salut et puis revient : "Pour La peau", tellement Dominique A, "En secret", sa plus belle chanson de tous les temps et une version nouvelle du "Métier de faussaire" une autre de ses grandes affaires. Le rappel est un sans faute. Au moment d’en finir, on se dit qu’étrangement on ne connaît aucune de ces chansons par cœur, qu’elles ne nous ont pas transformé comme d’autres en anglais. Mais Dominique A a toujours été là avec nous. Les autres sont nos dieux. Dominique A a été notre grand frère. Il y a un morceau là-dessus sur le nouvel album. L’histoire d’un frère qui doit empêcher son frère de se battre et vient le rechercher au petit matin après la bataille. "Je ne recommencerai plus, promis", il chante. Nous non plus. Et il recommence. Bien sûr. Comme tout le monde.
Allonnes le 23 janvier
Re: Allonnes le 23 janvier
Même si tu trouves que l'auteur "se la joue", tu aurais quand même pu indiquer son nom, au moment de copier-coller
De mon point de vue, c'est le meilleur article lu ces jours-ci...
Je préfère un mec qui "se la joue" et a des choses à dire, plutôt qu'un compte-rendu pseudo objectif sans intérêt.
De mon point de vue, c'est le meilleur article lu ces jours-ci...
Je préfère un mec qui "se la joue" et a des choses à dire, plutôt qu'un compte-rendu pseudo objectif sans intérêt.
Re: Allonnes le 23 janvier
Suis plutôt d'accord avec Eddy. Je trouve que les compte-rendu de Libé, Le Monde, Magic disent la même chose. J'ai eu l'impression de copiés-collés justement.
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Re: Allonnes le 23 janvier
+1Eddy B a écrit :De mon point de vue, c'est le meilleur article lu ces jours-ci...
Je préfère un mec qui "se la joue" et a des choses à dire, plutôt qu'un compte-rendu pseudo objectif sans intérêt.
je suis d'accord, très bonne critique
Re: Allonnes le 23 janvier
Ben oui, c'est pas mal le côté manque de distance de ce journaliste.Le journaliste a écrit :"En secret", sa plus belle chanson de tous les temps
Et puis ça colle avec les impressions d'Yvan:
Le journaliste a écrit : Difficile d’imaginer un set avec plus de 15 chansons jamais entendues par personne et recevant un tel accueil
Re: Allonnes le 23 janvier
Perplexe. C'est le mot qui permet de définir mon ressenti de cette deuxième partie de concert. Revisiter La Fossette, parfait, j'adhère, je la connais par cœur. Pourquoi un album culte : parce la musicalité des paroles colle parfaitement à la musique qui rend parfaitement compte du texte. Pour le nouvel album présenté en live dans cette formule, je suis perplexe. Peut être est-ce du au volume sonore trop fort, aux guitares trop électrisées avec le petit fils de Thurston Moore du feu Sonic Youth... Mise à part les instrumentaux, je n'ai pas entendu ce quintet à vent, dont j'attendais beaucoup quand je les découvre en début de concert, tout du moins pas plus que des bribes de sons qui me rappellent la tournée de "Tout Sera Comme Avant". Des textes que j'ai du mal à entendre (l'âge sans doute) et qui me rappelle des textes d'autres albums, plutôt des deux derniers, avec comme une sorte de posture dans leurs compositions (pour illustrer Ostinato pour L'inuktitut ou Nanortalik), Je ne retrouve plus la musicalité parfaites des vers, des strophes en symbiose parfaite avec la musique. Ah si, je les entends sur les deux chansons lentes ou je retrouve toutes les harmoniques de sa voix. Le rappel est parfait, je retrouve mes fondamentaux. Quand vient la phrase qui me permet de rationaliser mon ressenti : les arrangements ont été réalisés par le pianiste. Déjà décidé à attendre l'album pour bien expérimenter ses chansons, parce que Dominique, en secret, je t'aimais bien, ou que tu ailles, je te suivrais, je me dis vivement la prochaine tournée. Il parait qu'il jouera au Printemps de Bourges une création originale... Et comme dis Rosanna Arquette dans la scène pré finale du Grand Bleu : "Go, go and see my love"
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Re: Allonnes le 23 janvier
et les images qui vont bien : http://youtu.be/UayP9H9-660